On parle de lâor qui franchit un nouveau record, de Bayrou qui accuse lâItalie de dumping fiscal, de la flambĂ©e des taux dâemprunt français, du taux dâĂ©pargne Ă un niveau historique et du record mondial de concentration dâĂ©lus en France. Pour le dĂ©cryptage, focus sur lâaccord commercial entre lâUE et le Mercosur.
Lâor a franchi un nouveau sommet historique cette semaine en atteignant 3 570 dollars lâonce (31,1 g), effaçant son prĂ©cĂ©dent record dâavril. Depuis janvier, son prix a dĂ©jĂ bondi de plus de 33 %. Les investisseurs, inquiets, dĂ©laissent le dollar â pourtant refuge traditionnel â pour se tourner vers le mĂ©tal jaune. En ligne de mire : la perspective dâune baisse des taux de la Fed lors de sa rĂ©union des 16 et 17 septembre. Les marchĂ©s anticipent une rĂ©duction de 0,25 point, alors que lâĂ©conomie amĂ©ricaine ralentit et que lâindĂ©pendance de la banque centrale est fragilisĂ©e par la pression de Donald Trump. Cette bascule affaiblit le dollar et les rendements obligataires, renforçant mĂ©caniquement lâattrait de lâor. Les incertitudes politiques et commerciales pĂšsent Ă©galement. Vendredi, une cour dâappel fĂ©dĂ©rale a jugĂ© illĂ©gales une partie des droits de douane imposĂ©s par Trump. La dĂ©cision finale reviendra Ă la Cour suprĂȘme, mais ce flou alimente lâinquiĂ©tude des entreprises et des investisseurs. Lâor profite aussi de son rĂŽle de couverture contre lâinflation, alors que lâindice PCE publiĂ© en aoĂ»t confirme une hausse persistante des prix aux Ătats-Unis. Ă cela sâajoutent les tensions gĂ©opolitiques â guerre en Ukraine, conflit Ă Gaza â et les incertitudes sur la politique commerciale amĂ©ricaine. DerriĂšre ce record, le constat est clair : plus le monde est instable, plus lâor attire. Valeur refuge ultime, il concentre aujourdâhui les craintes dâun systĂšme monĂ©taire fragilisĂ© et les espoirs des investisseurs en quĂȘte de sĂ©curitĂ©.
Ăvolution du cours de lâor sur 3 ans - Zonebourse
Le Premier ministre sâen est pris ce dimanche Ă la taxe dite « Zucman », visant Ă instaurer un impĂŽt mondial minimal de 2 % par an sur la fortune des milliardaires. RĂ©clamĂ©e par les partis de gauche, cette mesure est qualifiĂ©e par Bayrou de « menace pour lâinvestissement en France », car elle risquerait selon lui de provoquer un exil massif des plus fortunĂ©s. Câest dans ce contexte quâil a dĂ©clarĂ© : « Les gens partent car il y a dĂ©sormais une sorte de nomadisme fiscal. LâItalie est aujourdâhui en train de faire une politique de dumping fiscal ! » Pour rappel, le dumping fiscal consiste pour un pays Ă appliquer des impĂŽts trĂšs bas afin dâattirer entreprises et capitaux. Au sein de lâUnion europĂ©enne, chaque Ătat membre conserve sa souverainetĂ© fiscale et fixe donc librement ses taux dâimposition. Il faut dire que lâItalie, et notamment Milan, sĂ©duit de plus en plus les grandes fortunes grĂące Ă des politiques fiscales attractives. Selon le Financial Times, plus de 100 000 personnes â Ă©trangers fortunĂ©s ou exilĂ©s fiscaux de retour â se sont installĂ©es dans le pays ces derniĂšres annĂ©es. ConcrĂštement, tout Ă©tranger sâinstallant en Italie peut choisir de payer un forfait annuel de 200 000 euros, plus 25 000 euros par enfant Ă charge, quels que soient ses revenus, et ce pendant 15 ans, avec en prime une exonĂ©ration totale des droits de succession sur la pĂ©riode. Ce rĂ©gime fiscal, instaurĂ© en 2017 sous Matteo Renzi et lĂ©gĂšrement modifiĂ© par Giorgia Meloni, sâajoute Ă une amĂ©lioration des finances publiques italiennes. Le dĂ©ficit du pays devrait passer sous la barre des 3 % lâan prochain, un niveau infĂ©rieur Ă celui de la France, ce qui contribue Ă redorer lâimage Ă©conomique de lâItalie.
Les taux dâemprunt Ă 30 ans de la France viennent dâatteindre 4,5 %, un niveau inĂ©dit depuis 2011. Dans le jargon financier, on parle des obligations assimilables du TrĂ©sor (OAT). ConcrĂštement, ce sont des emprunts lancĂ©s par lâĂtat français sur les marchĂ©s financiers : il demande aux investisseurs de lui prĂȘter de lâargent, quâil remboursera dans 30 ans avec des intĂ©rĂȘts. Le taux de 4,5 % correspond donc au coĂ»t de cet emprunt. Plus il est Ă©levĂ©, plus cela signifie que les investisseurs exigent des intĂ©rĂȘts importants pour prĂȘter Ă la France. Un tel niveau est une mauvaise nouvelle pour le budget de lâĂtat. Cela traduit une confiance fragilisĂ©e des marchĂ©s envers la France, rend la dette plus chĂšre Ă rembourser et rĂ©duit Ă terme la marge de manĆuvre de lâĂtat : moins dâargent pour financer les services publics, davantage pour payer les intĂ©rĂȘts. Les prĂ©visions de la Cour des comptes sont Ă©loquentes : la dette publique atteindrait 125 % du PIB en 2029, contre 114 % aujourdâhui. La charge de la dette â câest-Ă -dire le montant consacrĂ© au remboursement des emprunts â grimperait Ă 112 milliards dâeuros, contre 66 milliards estimĂ©s en 2025. En clair, en 2029, le remboursement de la dette deviendrait de loin le premier poste budgĂ©taire de lâĂtat, devant lâĂducation nationale. Cette dĂ©rive est aggravĂ©e par lâinstabilitĂ© politique rĂ©cente : dissolution de lâAssemblĂ©e, censure du gouvernement et retards dans les rĂ©formes budgĂ©taires. RĂ©sultat, les prĂȘteurs exigent des taux plus Ă©levĂ©s, accentuant encore la pression sur les finances publiques françaises.
Coup de théùtre statistique : pour la premiĂšre fois depuis le 4á” trimestre 2000, le taux dâĂ©pargne financiĂšre des mĂ©nages français a dĂ©passĂ© celui de leurs homologues allemands. Plus de 10 % au premier trimestre 2025, selon Eurostat et la Banque de France. Un symbole fort, tant lâAllemagne Ă©tait jusquâici considĂ©rĂ©e comme le modĂšle de discipline budgĂ©taire.
Banque de France
Pour rappel, le taux dâĂ©pargne financiĂšre est un sous-indicateur du taux dâĂ©pargne global des mĂ©nages. Il correspond Ă la part du revenu placĂ©e dans des produits financiers (et non dans lâimmobilier ou la consommation diffĂ©rĂ©e). Cela inclut :
Les dépÎts bancaires : Livret A, LDDS, LEP, comptes à terme, dépÎts à vue non consommés.
Les produits dâassurance-vie (fonds euros, unitĂ©s de compte).
LâĂ©pargne retraite (PER, Madelin, etc.).
Les investissements financiers : actions, obligations, OPCVM, ETF, crypto-actifs (classĂ©s dans les âautres actifs financiersâ des statistiques rĂ©centes).
Exemple simple : un mĂ©nage qui gagne 3 000 ⏠par mois, dĂ©pense 2 400 ⏠en consommation et place 600 ⏠sur son Livret A. Son taux dâĂ©pargne financiĂšre est donc de 600 / 3 000 = 20 %. Au premier trimestre 2025, les mĂ©nages français ont mis de cĂŽtĂ© 91 milliards dâeuros, frĂŽlant le record historique de 96,7 milliards atteint au printemps 2020, en pleine pandĂ©mie. Cette fois, ce nâest pas un virus qui nourrit cette Ă©pargne, mais lâincertitude politique. Ă la fin du deuxiĂšme trimestre, le taux dâĂ©pargne atteignait 18,9 %, un sommet inĂ©dit hors pĂ©riode Covid. DerriĂšre la moyenne nationale, les disparitĂ©s sont marquĂ©es : les cadres, indĂ©pendants et dirigeants Ă©pargnent jusquâĂ 22 % de leurs revenus, et les 10 % les plus aisĂ©s culminent Ă 33 %. Ă lâopposĂ©, les ouvriers (4 %) et employĂ©s (2 %) vivent quasiment sans marge de manĆuvre. Les retraitĂ©s, souvent perçus comme de grands Ă©pargnants, affichent un taux modeste de 8 % en moyenne, loin des clichĂ©s. Pour les Ă©conomistes, le constat est clair : mĂȘme si lâinflation recule et que les taux baissent, lâincertitude politique restera un puissant moteur dâĂ©pargne. LâOFCE (Observatoire Français des Conjonctures Ăconomiques) table sur une dĂ©crue lente, seulement Ă partir de 2026, autour de 18 %. En attendant, cette prudence pourrait coĂ»ter cher : sans reprise de la consommation, lâĂ©conomie française risque de rester engluĂ©e, incapable de sâappuyer sur un commerce extĂ©rieur atone et des finances publiques fragilisĂ©es. Dâailleurs, au premier trimestre 2025, la consommation des mĂ©nages en biens a reculĂ© de -0,6 %. Le mois de mars a marquĂ© un point bas inĂ©dit depuis novembre 2014 (hors pĂ©riode Covid), avec une chute de -1,0 % sur un mois, la plus forte depuis dĂ©cembre 2022.
Record mondial pour la France, qui affiche la plus grande concentration dâĂ©lus de la planĂšte. Avec ses 577 dĂ©putĂ©s, 348 sĂ©nateurs, 1 758 conseillers rĂ©gionaux, 4 044 conseillers gĂ©nĂ©raux, 34 787 maires, 459 811 conseillers municipaux ou encore 65 000 Ă©lus communautaires, notre pays totalise 567 222 Ă©lus au dernier pointage de la fondation iFRAP en 2023. Cela reprĂ©sente un mandat pour 122 habitants, un record mondial. Une mesure promise par Emmanuel Macron pendant la campagne prĂ©sidentielle de 2017, puis reprise dans un projet de rĂ©forme constitutionnelle en 2018, prĂ©voyait une baisse de 30 % du nombre de parlementaires. Le nombre de dĂ©putĂ©s devait passer de 577 Ă 404 et celui des sĂ©nateurs de 348 Ă 244. Ă lâĂ©poque, le coĂ»t annuel Ă©tait estimĂ© Ă 530 000 euros pour un dĂ©putĂ© et 680 000 euros pour un sĂ©nateur. La rĂ©duction du nombre de parlementaires aurait ainsi permis une Ă©conomie de 800 millions dâeuros sur une mandature de cinq ans.
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Le malheur des uns fait le bonheur des autres. Ainsi pourraient se rĂ©sumer les consĂ©quences de lâaccord de libre-Ă©change entre lâUnion europĂ©enne et le Mercosur, que la prĂ©sidente de la Commission europĂ©enne Ursula von der Leyen a finalisĂ© Ă Montevideo (Uruguay) vendredi dernier, malgrĂ© lâopposition de plusieurs pays dont la France.
Lâaccord de libre-Ă©change entre lâUnion europĂ©enne (UE) et le Mercosur (Argentine, BrĂ©sil, Paraguay, Uruguay) vise Ă supprimer environ 90 % des droits de douane entre les deux blocs, crĂ©ant ainsi une vaste zone de libre-Ă©change de 780 millions de personnes. NĂ©gociĂ© depuis 1999 et conclu politiquement une premiĂšre fois en 2019, il a longtemps Ă©tĂ© bloquĂ© par des diffĂ©rends sur lâaccĂšs aux marchĂ©s agricoles et industriels. En dĂ©cembre 2024, la Commission europĂ©enne a annoncĂ© avoir « finalisĂ© » les nĂ©gociations du traitĂ©, qualifiĂ© de « jalon historique » et dâaccord « ambitieux et Ă©quilibrĂ© » par sa prĂ©sidente Ursula von der Leyen. Cependant, ce texte controversĂ© doit encore ĂȘtre approuvĂ© par les 27 Ătats membres de lâUE et le Parlement europĂ©en avant dâentrer en vigueur.
Sur le plan gĂ©opolitique, ses partisans (Allemagne, Espagne, Commission europĂ©enneâŠ) y voient une occasion stratĂ©gique de renforcer les liens de lâEurope avec lâAmĂ©rique du Sud, Ă lâheure oĂč la Chine accroĂźt son influence dans la rĂ©gion. « Cela crĂ©era un marchĂ© de plus de 700 millions de personnes, synonyme de croissance et de compĂ©titivitĂ© », a ainsi saluĂ© le chancelier allemand Olaf Scholz. Ă lâinverse, plusieurs pays dont la France mĂšnent la fronde contre lâaccord, en raison des inquiĂ©tudes pour leur agriculture et le respect des normes environnementales. Le prĂ©sident Emmanuel Macron a jugĂ© le projet « inacceptable en lâĂ©tat », exigeant des garanties sur lâapplication de lâAccord de Paris, la rĂ©ciprocitĂ© des normes sanitaires/environnementales et des clauses de sauvegarde pour les filiĂšres sensibles. De fait, un protocole additionnel incorporant de nouvelles exigences en matiĂšre de durabilitĂ© a Ă©tĂ© proposĂ© en 2023, mais il a Ă©tĂ© rejetĂ© par le BrĂ©sil et lâArgentine qui le jugeaient « inacceptable et asymĂ©trique ». Lâissue reste donc incertaine, malgrĂ© la pression de Bruxelles pour une ratification rapide.
MalgrĂ© ces tensions, lâaccord UE-Mercosur apporterait dâimportantes opportunitĂ©s Ă©conomiques, en particulier pour les secteurs industriels europĂ©ens tournĂ©s vers lâexport. En supprimant progressivement les tarifs douaniers du Mercosur (jusquâĂ 35 % sur les automobiles, 14 % sur les produits pharmaceutiques, 18 % sur les machines, etc.), le traitĂ© ouvrirait largement les marchĂ©s sud-amĂ©ricains aux produits manufacturĂ©s du Vieux Continent. Ce nâest pas un hasard si lâaccord a souvent Ă©tĂ© rĂ©sumĂ© par la formule « des viandes contre des voitures », suggĂ©rant que lâEurope a concĂ©dĂ© des ouvertures agricoles en Ă©change dâun accĂšs accru pour ses produits industriels.
Selon lâĂ©tude dâimpact commandĂ©e par la Commission, les exportations europĂ©ennes vers le Mercosur pourraient bondir dans plusieurs filiĂšres clĂ©s : +95 Ă +114 % pour les vĂ©hicules et piĂšces dĂ©tachĂ©es, +109 Ă +149 % pour le matĂ©riel Ă©lectronique, +78 Ă +100 % pour les machines-outils, ou encore +311 Ă +424 % (!) pour les textiles et vĂȘtements. Ces hausses spectaculaires sâexpliquent par la levĂ©e de barriĂšres tarifaires trĂšs Ă©levĂ©es cĂŽtĂ© Mercosur. De mĂȘme, les exportations de produits chimiques et pharmaceutiques de lâUE vers lâAmĂ©rique du Sud pourraient croĂźtre dâenviron 47 %. Bien que les effets macroĂ©conomiques restent modestes (quelques dixiĂšmes de point de PIB gagnĂ©s seulement), ces nouveaux dĂ©bouchĂ©s rĂ©jouissent les industriels europĂ©ens. LâAssociation des constructeurs automobiles (ACEA) sâest ainsi fĂ©licitĂ©e du « rĂ©el potentiel de croissance » offert par le Mercosur aux vĂ©hicules europĂ©ens. La filiĂšre machines-outils, les fabricants de vĂȘtements et de produits de luxe, ou encore les producteurs de mĂ©dicaments et de cosmĂ©tiques europĂ©ens pourraient aussi profiter de cette ouverture. Pour lâUE, lâaccord consoliderait par ailleurs lâaccĂšs aux matiĂšres premiĂšres stratĂ©giques (lithium, cuivre, cobaltâŠ) dâAmĂ©rique latine, utiles notamment pour la transition Ă©nergĂ©tique et les batteries de vĂ©hicules Ă©lectriques. Enfin, certains services europĂ©ens (tĂ©lĂ©communications, services financiers, conseil, etc.) bĂ©nĂ©ficieront de la rĂ©duction dâobstacles non-tarifaires et de lâouverture des marchĂ©s publics sud-amĂ©ricains prĂ©vue dans le pacte.
En France, les grandes entreprises exportatrices se montrent globalement favorables Ă lâaccord. Les secteurs de lâaĂ©ronautique, de lâautomobile (Renault, Stellantis), du luxe et de la chimie espĂšrent renforcer leurs positions au Mercosur. Les vignobles et fromageries français pourraient Ă©galement tirer parti de lâaccord : lâaccĂšs au marchĂ© sud-amĂ©ricain des vins et spiritueux europĂ©ens devrait sâaccroĂźtre (~+37 % dâexportations cĂŽtĂ© UE), tout comme celui des produits laitiers europĂ©ens (+91 Ă +121 % dâexportations de lâUE selon les scĂ©narios). De plus, 357 indications gĂ©ographiques protĂ©gĂ©es (AOP/IGP) seront reconnues par le Mercosur, ce qui protĂšgera des produits français emblĂ©matiques (fromages, vins, charcuteries) contre les imitations. Conscientes de ces enjeux, les organisations patronales françaises (MEDEF, France Industrie) soutiennent depuis le dĂ©but le traitĂ©, y voyant « une dĂ©marche stratĂ©gique pour la stabilitĂ© et la prospĂ©ritĂ© mutuelle » de lâEurope et de lâAmĂ©rique du Sud. Elles soulignent aussi quâenviron 20 % des emplois français dĂ©pendent des exportations, et quâĂ ce titre, favoriser lâaccĂšs Ă 750 millions de consommateurs supplĂ©mentaires serait une aubaine.
En contrepartie de ces gains industriels, lâUE a consenti des concessions importantes sur lâagriculture, ce qui suscite de vives inquiĂ©tudes chez les agriculteurs europĂ©ens. La Commission europĂ©enne a elle-mĂȘme admis que lâagriculture servirait de « monnaie dâĂ©change » dans cet accord gĂ©ant. ConcrĂštement, lâEurope ouvrirait des quotas dâimportation sans droits de douane pour plusieurs productions agricoles du Mercosur : 99 000 tonnes de viande bovine par an (soit ~1,6 % de la production europĂ©enne), 180 000 tonnes de volaille, 180 000 tonnes de sucre, 650 000 tonnes dâĂ©thanol, ainsi que des volumes de porc, riz, miel, etc. En parallĂšle, les tarifs douaniers europĂ©ens seraient supprimĂ©s sur divers produits agro-industriels sud-amĂ©ricains (alcools, cafĂ©, huile, fruits tropicauxâŠ). Si certaines filiĂšres europĂ©ennes y gagnent (par exemple les producteurs de vin et spiritueux dĂ©jĂ mentionnĂ©s, ou la filiĂšre laitiĂšre grĂące Ă la reconnaissance des appellations), dâautres risquent la concurrence de produits importĂ©s meilleur marchĂ©.
Les Ă©leveurs de bovins et de volailles sont en premiĂšre ligne. En Europe, la viande est produite Ă des coĂ»ts plus Ă©levĂ©s â normes sanitaires strictes, bien-ĂȘtre animal, Ă©levages extensifs â alors que le bĆuf brĂ©silien, argentin ou uruguayen bĂ©nĂ©ficie dâexploitations Ă grande Ă©chelle (feedlots) et de coĂ»ts moindres (aliments moins chers, main dâĆuvre, traitements vĂ©tĂ©rinaires intensifs). Les agriculteurs français dĂ©noncent une distorsion de concurrence : « LâUE encourage chez nous un Ă©levage au pĂąturage, tandis quâelle favorise les importations de viandes sud-amĂ©ricaines dâanimaux engraissĂ©s aux antibiotiques activateurs de croissance, dans des feedlots de 10 000 bĂȘtes », sâinsurgent plus de 600 parlementaires français dans une tribune du Monde. MĂȘme si la Commission relativise en chiffrant lâimpact Ă -1,2 % de production europĂ©enne de bĆuf dans le pire scĂ©nario, le secteur craint un effet dĂ©pressif sur les prix et la viabilitĂ© des exploitations dâĂ©levage. De la mĂȘme maniĂšre, les producteurs de sucre europĂ©en (betteravier) redoutent lâarrivĂ©e de sucre de canne brĂ©silien Ă bas prix : le quota additionnel de 180 000 tonnes reprĂ©sente un choc concurrentiel non nĂ©gligeable sur un marchĂ© dĂ©jĂ fragile. Enfin, lâaccord prĂ©voit aussi un contingent pour lâĂ©thanol sud-amĂ©ricain, ce qui inquiĂšte la filiĂšre bioĂ©thanol française (issue de la betterave et des cĂ©rĂ©ales).
Au-delĂ de la question des volumes, se pose celle des normes et de la rĂ©ciprocitĂ©. Aujourdâhui, les agriculteurs europĂ©ens doivent respecter des standards rigoureux (interdiction de certains pesticides, traçabilitĂ©, bien-ĂȘtre animal, rĂšgles environnementales du Pacte vert, etc.). Or, ces exigences ne sâappliquent pas aux producteurs du Mercosur exportant vers lâUE, ce que beaucoup dĂ©noncent comme un deux poids, deux mesures. « Cela rĂ©vĂšle lâincapacitĂ© de lâEurope Ă faire respecter les rĂšgles quâelle impose Ă ses propres producteurs », regrette par exemple Alexandre Saubot, prĂ©sident de France Industrie, qui appelle Ă mieux protĂ©ger nos agriculteurs face Ă ces incohĂ©rences. De surcroĂźt, les questions environnementales pĂšsent lourd dans le dĂ©bat. Un rapport dâexperts mandatĂ© par le gouvernement français en 2020 a conclu que lâaccord UE-Mercosur risquait dâaccĂ©lĂ©rer la dĂ©forestation en Amazonie (jusquâĂ +700 000 hectares sur 6 ans), notamment pour accroĂźtre les Ă©levages bovins, et dâentraĂźner des Ă©missions de COâ supplĂ©mentaires supĂ©rieures aux gains Ă©conomiques attendus. Autrement dit, le coĂ»t climatique et Ă©cologique de lâaccord pourrait surpasser ses bĂ©nĂ©fices commerciaux. Ces constats alimentent lâopposition de pays comme la France ou lâAutriche, qui exigent des engagements fermes du Mercosur en matiĂšre de durabilitĂ© (respect de lâAccord de Paris, lutte contre la dĂ©forestation illĂ©gale, etc.). La Commission assure avoir renforcĂ© ce volet : les normes environnementales seraient dĂ©sormais des « Ă©lĂ©ments essentiels » du pacte, permettant de suspendre lâaccord en cas de manquement, et des engagements contraignants contre la dĂ©forestation ont Ă©tĂ© ajoutĂ©s. MalgrĂ© cela, des doutes subsistent quant Ă la mise en Ćuvre effective de ces garde-fous.
Au final, le bilan du traitĂ© Mercosur apparaĂźt contrastĂ© pour lâEurope et tout particuliĂšrement pour la France. Du cĂŽtĂ© des âgagnantsâ, on compte clairement lâensemble des industriels-exportateurs europĂ©ens : automobiles, machines, chimie, textile, agroalimentaire transformé⊠Ceux-ci accĂ©deraient Ă un gigantesque marchĂ© en croissance, avec Ă la clĂ© des hausses de ventes substantielles (jusquâĂ +100 % ou plus dans certains secteurs). Les consommateurs europĂ©ens pourraient aussi profiter de prix plus bas sur les importations tropicales (fruits, cafĂ©, viandeâŠ), bien que cet effet soit modĂ©rĂ© par les quotas et les normes. Plusieurs pays (Allemagne, Espagne, Pays-BasâŠ) soutiennent donc vivement lâaccord, y voyant un moteur de croissance non nĂ©gligeable. Le chancelier Scholz a ainsi plaidĂ© pour « davantage dâaccords de libre-Ă©change » afin de dynamiser une Ă©conomie allemande en difficultĂ©. De mĂȘme, la grande distribution europĂ©enne sâimpatiente dâaccĂ©der Ă de nouvelles sources dâapprovisionnement compĂ©titives.
Ă lâinverse, les âperdantsâ potentiels sont identifiĂ©s dans les filiĂšres agricoles et agroalimentaires exposĂ©es : Ă©levage bovin et avicole, sucre, Ă©thanol, et certaines cultures concurrentielles des productions sud-amĂ©ricaines. Ces secteurs, trĂšs prĂ©sents en France, en Irlande ou en Pologne, redoutent une Ă©rosion de leurs parts de marchĂ© et une course au moins-disant. Lâagriculture française en particulier, dĂ©jĂ en crise, a fait de cet accord son ennemi numĂ©ro un : manifestations de masse, « actes » de la colĂšre paysanne, et pressions sur le gouvernement se sont multipliĂ©s en 2023-2024 pour exiger lâabandon du traitĂ©. La puissante association Copa-Cogeca (syndicats agricoles de lâUE) a appelĂ© « les Ătats membres et le Parlement europĂ©en Ă se mobiliser contre cet accord », estimant quâil « exacerbera les pressions Ă©conomiques » sur de nombreuses exploitations fragiles. Face Ă cette levĂ©e de boucliers, plusieurs gouvernements ont durci leur position : la France, mais aussi la Pologne, lâIrlande, lâAutriche, lâItalie ou la Belgique ont exprimĂ© leur intention de bloquer la ratification en lâĂ©tat. Ces pays forment une coalition suffisamment large pour faire Ă©chouer le traitĂ© (lâadoption requiert lâunanimitĂ© des 27).
Entre ces deux camps, la Commission europĂ©enne tente de concilier et de rassurer. Bruxelles a promis des garanties « robustes » aux agriculteurs inquiets : un « acte juridique » complĂ©mentaire va renforcer les mesures de sauvegarde sur les produits sensibles. ConcrĂštement, des clauses permettent de restreindre temporairement les importations agricoles en cas de perturbation grave du marchĂ© europĂ©en. Les quotas de viande, sucre, volaille, etc., seront introduits progressivement sur 7 ans pour lisser lâimpact. Et un budget dâaide Ă la reconversion des producteurs Ă©ventuellement lĂ©sĂ©s est Ă©voquĂ©. La Commission souligne par ailleurs que le Mercosur a acceptĂ© des phytosanitaires Ă©quivalents aux normes europĂ©ennes pour plusieurs produits, et quâune coopĂ©ration sanitaire renforcĂ©e est prĂ©vue pour Ă©viter lâentrĂ©e de denrĂ©es non conformes. Ces engagements ont conduit Paris Ă reconnaĂźtre des « avancĂ©es » fin 2024-dĂ©but 2025 : la France a saluĂ© que lâUE ait « entendu [ses] rĂ©serves » sur la rĂ©ciprocitĂ© et la protection des filiĂšres. NĂ©anmoins, le gouvernement français reste trĂšs prudent, soulignant quâil « doit analyser » les clauses de sauvegarde annoncĂ©es et quâil jugera « sur piĂšces » de lâeffectivitĂ© des garanties.
Lâaccord UE-Mercosur ne fait donc pas lâunanimitĂ© et sa qualification de « bonne nouvelle » dĂ©pend du point de vue adoptĂ©. Sur le plan strictement Ă©conomique et commercial, il offre Ă lâEurope de nouvelles opportunitĂ©s dâexportation et renforce sa prĂ©sence dans une rĂ©gion stratĂ©gique â ce qui est perçu positivement par de nombreux dirigeants et industriels europĂ©ens. Pour la France, dont lâĂ©conomie est Ă la fois industrielle et fortement agricole, le tableau est mitigĂ© : certaines entreprises tricolores y gagneraient des marchĂ©s (automobile, luxe, agroalimentaire exportateurâŠ), mais de nombreuses exploitations agricoles y perdraient en compĂ©titivitĂ©. Au-delĂ , des enjeux non commerciaux brouillent lâapprĂ©ciation : lâaccord soulĂšve des questions de souverainetĂ© alimentaire, de modĂšle agricole (qualitĂ© vs quantitĂ©) et de lutte contre le changement climatique. Autant de sujets sensibles qui font que, Ă ce stade, la France demeure rĂ©ticente Ă ratifier le traitĂ©. Lâavenir du pacte UE-Mercosur dĂ©pendra des compromis trouvĂ©s pour rĂ©pondre Ă ces prĂ©occupations. Lâaccord conclu doit en effet maintenant ĂȘtre validĂ© par les 27 Ătats membres, puis par le Parlement europĂ©en. La France a immĂ©diatement rĂ©agi, affirmant, par la voix de sa ministre dĂ©lĂ©guĂ©e au Commerce extĂ©rieur dĂ©missionnaire, Sophie Primas, que lâannonce de ce «deal» par la Commission europĂ©enne «nâengage quâelle». Les prochaines semaines seront dĂ©cisives.
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